Photo JY Blouin

L’héroïsme, la mise en avant de son courage, comme il en a été hier, avec Manuel Escribano dans le coso du Baratillo de manière magnifique, c’est la base de la tauromachie, sa justification ultime. Le sacrifice gratuit d’une vie humaine ou de son intégrité physique accompagne ainsi celui d’un animal. Il y a là une sorte d’équivalence. Cette juste réparation (potentielle) fonde ce rituel dramatique qui n’a rien à voir avec une sorte de jeu ou de démonstration d’habileté.

L’opposition entre une bête féroce et la froide détermination d’un individu voilà ce qui justifie la tauromachie : cet art millénaire. Il n’y a pas d’activité plus humaine si on la considère du point de vue de l’Histoire de l’Humanité que cette confrontation.

Hier le sympathique torero de Gerena qui a eu tant de mal à s’imposer a fait une démonstration éclatante de cette vérité : la qualité première, essentielle, fondamentale du combattant c’est le courage. Arrive ce qui arrive faits ce que doits : c’est le Nec Plus Ultra. Les jeunes gens qui de plus en plus nombreux se lancent dans la carrière taurine ont-ils bien mesuré cette devise ultime ? Savent-ils ce qu’ils portent, ce qu’ils risquent ? Le formatage de ces écoles incline-t-il à cette acceptation du sacrifice ? Il y a une inclinaison dans le toreo moderne à l’esthétisme, au bon goût qui va à l’encontre de cette vérité et quand un homme comme Ecribano remet les pendules à l’heure le spectacle prend alors une dimension quasi mystique.

On les appelle les vaillants ; Escribano est en tête de cette cohorte de toreros, qui portent ces valeurs tous les dimanches parfois dans des arènes portatives, modestes, devant un public souvent festif et peu au fait des dangers qu’ils encourent. Je pense à Padilla, à Pepin Liria, à Lopez Chavez pour évoquer un passé récent. Les vaillants (ou vaillantasses) ce terme dépréciatif, inique est à bannir désormais du vocabulaire taurin, car les vaillants sont les courageux.

Pierre Vidal