Séville30 septembre, 2eme corrida de la San Miguel.

Toros de Victoriano del Rio et Toros de Cortes.Entre 510et 530kgs.

Sebastien Castella, Rose et or : Oreille et Deux oreilles, sortie par la Porte du Prince.

Alejandro Talavante, Nazareño et or : silence et division d’opinion.

Andres Roca Rey,coq de roche et or : silence et silence.

Lleno de no hay billetes, 34°.

Le sorteo a sans doute joué un vilain tour à Talavante, mais même s’il a eu les deux plus mauvais toros de l’envoi de Victoriano del Rio, on n’a pas eu un seul instant l’impression que le torero tentait de faire le maximum , si bien qu’à son premier  il aligna quelques passes décousues mais sans tenter de lier , quant au cinquième il était intoréable et la chose fut vite entendue, le public regimba un peu et hop, aux oubliettes.

Un mot sur Roca Rey qui arborait un costume terne comme l’air qu’il affichait sur son visage en entrant dans le ruedo.  Où donc était le flamboyant matador péruvien ? Certes son premier toro ne méritait pas le moindre effort mais connaissant Andres Roca Rey, lorsque sortit le 6eme, au-delà des sales intentions qu’exposait le toro, on voulait croire que le torero ferait l’impossible pour rattraper un peu l’avance énorme de Castella sur lui ! Et c’est ce qu’il tenta, à coup de cites d’une audace incroyable, prenant des risques insensés, bien dans son style, mais il était écrit qu’Andrés ne pourrait  rien faire de  solide ni de concluant : le petit noir de 4ans  qui avait semé le désordre dans le ruedo, en allant d’un cheval à l’autre, cherchant la sortie, poursuivant les banderilleros  allait encore faire échouer Roca Rey à l’épée.

Mais, jusqu’au bout, pour prouver que Roca Rey est Roca Rey, il s’arrima, fit passer le bicho dans son dos, passant tout près de la correctionnelle, il inventa ce toro, et au moment de l’épée  le regard seul du matador aurait pu suffire à tuer ! Mais non, pinchazo deux fois, puis un désarmé puis une entière pas jolie..

Parlons maintenant de ce qui ravit tout le public et le mit debout plusieurs fois : les deux prestations de Sébastien Castella. Au premier renvoyé aux corrales on attendit le premier bis avec angoisse.

Mais il sortit un joli noir  de 4ans et 520 kg qui répondit aux sollicitations du torero, au capote tout du moins . Le brindis fut pour José Chacon,ému, et Castella ne lui dédia pas la mort de ce toro pour rien : il lui fit faire de jolies choses, tout près , dans le jambes, sans jamais bouger un orteil, impassible, impavide, froid et pur, courageux comme personne.

Malgré un pinchazo, la seconde épée lui valut une oreille exigée par le conclave .

Le grand moment restait à venir, ce fut à son second adversaire qu’il brinda au public. Un animal bas, le plus armé du lot, noir, astifino qu’il reçoit très élégamment au capote et, à l’inverse de ses frères il sortit des deux piques la bouche fermée. Bien jugé par le maestro, le piquero ne donna qu’une toute petite seconde puya.A la brega José Chacon place  l’animal en bonne position pour Viotti et Blasquez qui ont pourtant du mal à faire démarrer ce toro parado. Sébastien Castella n’en brinde pas moins le toro au public et commence la faena de mort par des passes très basses dans les pieds et termine la tanda par une trinchera comme un paraphe autoritaire.

Le toro proteste mais le maestro s’obstine, poursuit l’ouvrage, oblige le toro, commande et lie l’ensemble comme un grand chef d’orchestre , gestuelle superbe, final éblouissant.  Alors que, faut- il le rappeler ce toro était compliqué, exigeant, encasté, racé, seul Sébastien Castella avait pu deviner ce que contenait cet animal avec sa vista et son incroyable courage.

Une grande épée entière et une  pétition unanime, la première oreille accordée sans attendre par le président , pétition insistante et deuxième oreille qui assurait la sortie par la PORTE DU PRINCE au grand maestro français dont il n’est pas inutile de rappeler qu’il est revenu après trois ans d’absence encore plus  haut qu’il n’avait jamais été, atteignant à une pureté , un naturel et  un art personnel encore jamais atteints par lui.

Et voir arriver Sébastien Castella dans le couloir de la Maestranza, concentré, sévère et comme recueilli et le voir sortir sur les épaules tout sourire, libéré et heureux, cela explique et justifie tous les risques pris et les efforts que font les toreros.

Jean François Nevière

PS Sébastien Castella remplacera Morante de la Puebla ce dimanche à Séville pour la despedida d’El Juli.