Arnedo. 16 mars, arènes couvertes combles, no hay billetes, deux heures quinze de spectacle. Six toros d’Alcurrucen, présentés pour un cartel de vedette, mais tenant sur leur pattes très nobles et avec un joli fond de caste. Tous deux piques à l’exception du troisième et du sixième, un châtiment. Tous brave sous le fer.

Morante de la Puebla (vert et or) au premier, un pinchazo, une entière et cinq descabellos, silence ; au quatrième, une demi-lame et quelques sifflets.

Diego Urdiales (rioja et azabache) au deuxième, deux pinchazos, une entière, avis, silence ; au cinquième, trois pinchazos, une entière, avis, applaudissement de sympathie.

Alejandro Talavante (bleu ciel et or) au troisième, un pinchazo, une entière, deux descabellos, salut ; au dernier, un pinchazo, une entière, une oreille.

Et si 2024 devenait l’année du torero d’Estrémadure, Alejandro Talavante ? On pourrait le croire à voir le début de saison, samedi 2 mars il triomphait à Olivenza et samedi 16 mars il sauvait la corrida de printemps d’Arnedo. Il fut le seul à couper une oreille qui aurait pu être doublé s’il avait tué au premier essai. Mais en quelques minutes il reléguait loin derrière lui l’artiste andalous Morante de la Puebla et le rigoureux castillan Diego Urdiales. En fait Talavante comme il y a quinze jours a manifesté une furieuse envie de toréer et de gagner… Comme ce début de seconde faena, ou à genoux, il citait de très loin, Antequerano, le dernier Alcurrucen de la course. Il enchaînait aussitôt sur une surprenante série de naturelles, lentes, muleta très basse et poursuivait son festival en changeant rapidement de main, se défaisant d’un adversaire trop pressant par quelques trincheras imparables. La musique ajoutait a ce début de succès en interprétant le paseo de la ville reprit en chœur par une arène sans une place de libre. La voie royale lui était ouverte, la grande porte s’entrebâillait mais un premier pinchazo ruinait tous ces espoirs de triomphe.

A son premier adversaire il avait témoigné de cette volonté dès les premières figures de cape et des quite par gaoneras. Sa faena fut marquée par une muleta très basse servant un répertoire très varié sur un rythme plutôt rapide qu’il ralentissait jusqu’à une série de gestes enjôleur. Un salut pour en finir

Morante au grand regret de tous échoua tout d’abord à la cape, se rattrapa en début de faena par quelques derechazos accompagnés de olés… Mais après deux ou trois naturelle il se retira très vite de la confrontation. Au quatrième, il n’a jamais trouvé la distance et n’a pas compris un toro, noble mais qui se retournait comme un chat. Il renonça rapidement et termina sous les sifflets prémices de la bronca qui l’accompagna pour sa sortie.

Devant son public, Diego Urdiales ne parvint jamais à la décontraction nécessaire malgré une première sortie avec des véroniques de grande classe et une faena avec quelques bon moments. En revenant avec le cinquième il eut sûrement le tort de faire trop piquer et avec un adversaire poussif, se défendant sur place il n’y avait guère de possibilités de trouver un sitio. Une sortie pour peu de choses, malgré une forte ovation de sympathie.

Attendons pour voir si Talavante poursuit sa marche vers les triomphes.

Jean-Michel Dussol