Bayonne. Première des Fêtes de Bayonne. Deux tiers d’entrée.

Toros de Juan Manuel Criado, bien présentés  nobles avec de la qualité, le quatrième violent.

CLEMENTE, oreille et ovation;

JESÚS ENRIQUE COLOMBO, ovation et oreille avec pétition de la seconde;

DORIAN CANTON, ovation et vuelta al ruedo.

Belle entrée pour la fameuse corrida des fêtes une date toujours difficile et point positif beaucoup de jeunes dans ce public souvent venus à l’occasion de la célébration du Roi Léon ou tout simplement de passage dans le coin. Ce rebond sera-t-il durable ? Ferons-nous de ces nouveaux arrivants des aficionados lucides et convaincus ?  Il y avait hier des arguments pour être optimiste à commencer par un lot de toros bien présentés, très sérieusement armés, lourds et charpentés et âgés de cinq ans pour cinq d’entre eux. Un lot qui s’est avéré maniable, médiocre à la pique mais avec de la classe par la suite et de la transmission souvent. La prime au cinquième et sixième, le quatrième plus âpre.

Clemente avait répondu présent malgré sa blessure montoise récente et il ne doit pas regretter ce choix courageux et plein de panache. On a bien vu qu’il était handicapé et qu’il ne pouvait s’appuyer sur sa jambe blessé (les pints se sont-ils réouverts durant le combat? Cela explique-t-il cette tâche de sang sur la jambe?). Malgré ce sacré handicap il nous a proposé deux traestos différents, aux contenus solides et qui confortent son image de torero courageux mais aussi habité par le sens des responsabilités et la capacité. Bien à la cape lors de ses deux passages, il a brillé dans la suite du  combat dans des registres bien différents. On a vu sa classe, sa toreria et son sens du rythme face au premier bien tué d’un estoconazo. Il eut plus de difficulté à imposer sa loi au dur quatrième, bronco qu’il fallait assujettir. Il l’a fait avec conviction, terminant par deux séries de la gauche aux petits oignons. Une entière tombée, deux descabellos et une mort trop lente de l’animal pour voir son travail récompensé.

Colombo a touché le bon lot et il a imposé son toreo allègre certes mais aussi un tantinet racoleur. Varié et habile à la cape, il plaît aux banderilles qu’il pose avec plus ou moins de réussite pourtant. Plus d’adornos que véritables séries construites dans ses deux faenas superficielles mais qui ont porté sur les tendidos. Il tua d’un bajonazo précédé d’un pinchazo le premier et d’une entière tombée le second. Même si nous ne mésestimons pas une certaine forme d’enthousiasme, Colombo est tombé hier dans une démagogie qui nuit à sa force de conviction : ne confondons pas populaire et populisme. Point trop n’en faut…

On avait des yeux de Chimène pour Dorian Canton sérieux à l’extrême toute la soirée. Il a beaucoup appris le jeune homme d’Asson et ses bonnes manières sont à louer. Il a élu un chemin difficile celui de la pureté et du toreo sans concession, on a envie de dire essentiel. Il y parvient d’ailleurs mais il y a entre lui et le public une sorte de froideur pudique qui freine l’adhésion et nuit à l’enthousiasme. Il lui a manqué hier cette qualité essentielle au toreo moderne : l’entrega. Il l’a en lui sans aucun doute mais il ne la transmet pas par pudeur peut-être: Pourtant cela fait aussi partie du toreo. Otro dia sera ! (deux tiers bas et une entière tombée suivie de deux descabellos).

Pierre Vidal

Photos Bruno Lasnier