Il y a mille manières de gloser sur l’art de Cuchares, mille façons de se traiter de malotru ou de prétentieux, de ne rien dire en montrant qu’on n’en pense pas moins…Et pourtant on en parle, on en garde des souvenirs, quelques images fortes, et cela seul fait notre bonheur d’avoir assisté à des corridas.
Depuis quelques années la feria d’Istres change de dimension. L’intelligence de son patron, Bernard Carbuccia, son inventivité son origilnalité ont fait qu’Istres ne ressemble pas à ces corridas “copiées collées” d’ici ou là.

Le cru 2025 a vu deux grandes figuras se donner comme au premier jour, au point d’émouvoir autant que surprendre les gradins copieusement remplis. Miguel Angel Perera , vanille et or, presque le costume d’une alternative nous a éblouis et quelques-uns m’ont dit qu’il avait “transmis”, communiqué avec le public. Les reproches de froideur qui lui étaient faits jadis avaient disparu Sa douceur, sa technique imparable son art ont séduit et ému.
Diego San Roman, en mexicain de la grande famille des audacieux aztèques, a failli se faire prendre méchamment, mais le torero de Querétaro s’est imposé.

Parlons encore des hommes: David Galvan en chef de lidia , aurait pu couper deux oreilles d’entrée mais passer en premier freine la générosité des présidences.
Nous n’avons croisé que des spectateurs heureux sauf les grincheux habituels, plus ou moins ayatollahs de la pique et du toro dur voire sulement doté d’une immense paire de cornes. A Istres les cornes sont dites “commodes” mais en dehors des Zalduendo on eut des toros encastés et les la Quinta ou La Ventana del Puerto ou même les compliqués et pas si infumables que cela J P Domecq nous ont ménagé des surprises et le hommes se sont engages comme des morts de faim.

La plus belle image? de là où j’etais placé l’épée recibiendo de Juan Bautista, absolument parfaite qui lui valut les trophées suprêmes et juste après la réponse de l’élève au maitre d’un recibir par Marco Perez.
‘Emocion’ Et s’il est des endroits où la musique est mal ou trop jouée , l’orchestre Chicuelo II a été parfait. Pas de doute,ce fut une belle feria, et si on peut parler d’argent sans être vulgaire, les tarifs d’abonnement sont plus que raisonnables.
Je réduis encore un peu la focale de mes persistances rétiniennes et que vois- je ? Perera vanille et or, Galvan en noir et vertical, Juan Bautista attendant la charge de son toro et l’alimon du maestro avec son pupille déjà maestro, bientôt Figura si Dios Quiere.
Et en fond d’ecran Manuel Escribano grossièrement sifflé et furieux de cela, par un type dans les gradins à qui il réserva un regard qui tue. Et Solal qui oublia de toréer son premier toro et se reprit avec style à son second ? Et Ortega qui n’était pas vraiment là et que pourtant on imagine au plus haut des marches. Et Clemente qu’on fit crouler sous les trophées, évidemment à l’excès. Et Colombo qui partagea les banderilles avec Solal et Escribano lors des trois premiers toros et se joua la vie en sautant au milieu des cornes; l’indomptable jeune vénézuélien a un cœur formidable
Un reproche? L’affreux toro de presque 600Kg cornes en balais, qui n’aurait jamais dû sortir. Revoir un peu la comptabilité des oreilles…
Mais enfin… olé olé y olé!!!
Jean François Neviere
Photos Bruno Lasnier