C’est devant la grande porte des arènes du Puerto de Santa Maria que Daniel Crespo m’avait donné rendez vous cet après-midi. Cette grande porte qu’il a déjà franchi cinq fois porté en triomphe, et la dernière samedi dernier porté par Octavio Chacon qui rendait ainsi hommage à son compagnon torero de la province de Cadiz.

Aujourd’hui c’est confortablement installés en barrera dans une arènes étonnamment calme qu’il me raconte son premier rendez vous avec le toro assis en gradas aux côtés de son grand père, ses premières émotions et la naissance de sa vocation de torero. A douze ans il intègre l’école taurine de Jerez de la Frontera sous la direction d’Antonio Lozano. Ce sont ses premiers contacts avec le capote et la muleta mais aussi très vite avec le bétail brave un becera tout de suite puis sa première novillada sans picadors dans la placita de Chapin siège de l’école. Daniel apprend les fondamentaux du métier et torée un cinquantaine de novillada sans chevaux une période de très bons souvenirs. Il débute en 2013 avec picador à Avila. Il torera une quarantaine de novilladas piquées , essentiellement dans la région de Madrid, les novilladas piquées étant devenues rares dans le sud de l’Andalousie. Enfin le 4 Août 2014 c’est le jour de l’alternative, un événement qu’il souhaitait depuis ses débuts. C’est avec beaucoup d’émotion qu’il raconte la chose : un événement à la hauteur de tous ses rêves , le cartel tout d’abord Morante et Manzanares mais aussi dans ces arènes du Puerto qu’il considère comme sa maison, son public et cette première sortie en triomphe par la puerta Real.

Ce triomphe n’était que le premier, il sera suivi par quatre autres. Daniel explique que pour lui toréer au Puerto est synonyme de beaucoup de responsabilités devant ses amis et sa famille mais aussi de forte motivation dans cette arène où il vient s’entraîner tous les jours et qu’il connaît par cœur.
Cette année 2025 est une année importante dans la carrière de Daniel Crespo. Il y a tout d’abord cet excellent parcours dans la Copa Chenel dans laquelle après une bonne trajectoire, il a participé à la finale à deux. C’est une véritable compétition dit-il., la concurrence est dure entre les 18 toreros sélectionnés qui toréent très peu, Daniel par exemple n’avait pas toréé une seule fois en 2024. Selon Daniel ce sont « des après midi de feu » C’est vraiment l’occasion de se montrer et de se faire valoir d’autant plus que les corridas sont télévisées, et ce ,devant un bétail peu connu et souvent difficile.

Nous en arrivons enfin à cette corrida du 9 Août, une tarde importante surtout au vu de la compétition entre les deux grandes figuras du moment Morante et Roca Rey, devant des arènes archi-combles et une ambiance électrique. « Je n’ai pas eu de chance à mon premier toro j’ai donc joué le tout pour le tout à mon second » explique Daniel, « pour la première fois de ma vie je suis allé à Puerta gayola attendre mon toro et j’ai donné huit véroniques qui ont levé le public et pour la première fois de l’histoire de la plaza la musique a joué au capote. Par la suite j’ai donné la meilleure faena de ma vie tout s’enclenchait par magie ». Pour nous qui avons vécu cette après midi, il est particulièrement émouvant d’entendre l’auteur parler de son œuvre.

Daniel Crespo est actuellement apodéré par Luisito, un français installé à Sanlucar de Barameda qui fût il y quelques années celui qui fit découvrir Emilio de Justo. L’un et l’autre ont une grande confiance dans l’avenir même si ils sont bien conscients de la difficulté de percer dans cette profession. Daniel est quasiment inédit en France il n’a toréé qu’un toro dans la corrida à six de Bayonne en 2022 et espère bien pouvoir se produire à nouveau outre Pyrénées. Son parcours dans la Copa Chenel devrait aussi lui ouvrir les portes de Madrid l’an prochain pour une confirmation d’alternative qu’il sent plus proche que jamais. Souhaitons lui le meilleur pour la temporada à venir et il reste encore quelques mois cette année, même si tous les cartels sont faits, sait-on jamais ?
Jean Dupin